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24 mars 2022

Jean-Philippe Thibault - jpthibault@medialo.ca

Fondaction investit 1 M$ dans Kuma Brakes

GASPÉ

Plaquette BB

©Jean-Philippe Thibault - Gaspésie Nouvelles

Le produit a donc été développé de 2010 à 2015, et l’usine construite de 2015 à 2017. Comptez un autre 18 mois pour obtenir le sceau d’approbation de General Electric.

Le fonds de travailleurs québécois indépendant Fondaction croit au potentiel de croissance de Plaquettes de frein haute performance B.B. en y investissant environ au moins 1 million de dollars.

Aussi connue sous le patronyme Kuma Brakes, l’entreprise se spécialise dans les plaquettes de frein pour les éoliennes. Fondaction explique que sa contribution financière s’inscrit dans sa stratégie d’investissement visant à contribuer à l’essor des entreprises québécoises qui luttent contre les changements climatiques. « Plaquettes de frein B.B se distingue par la qualité et la durabilité de ces pièces critiques à l’industrie éolienne et fait partie de la chaine de valeur des entreprises qui ont un impact positif sur la réduction des gaz à effet de serre », explique Claire Bisson, chef adjointe de l’Investissement à Fondaction.

L’appui financier permettra au fabricant de plaquettes de frein pour les éoliennes de grande puissance de poursuivre sa croissance « dans une industrie qui tourne déjà à plein régime et de diversifier ses marchés », ajoute Claire Bisson.

Plus résistantes

 

La technique de fabrication de Kuma Brakes a l’avantage de prolonger la durée de vie des plaquettes de frein, celles-ci résistant mieux à la chaleur lors du freinage. La qualité de ses produits a d’ailleurs été reconnue par General Electric (GE), le géant américain ayant fait de Plaquettes de frein B.B le seul fabricant certifié de ce type de pièces en Amérique du Nord pour équiper ses éoliennes. « La filière éolienne est en expansion au pays et nous sommes convaincus de pouvoir y jouer un rôle encore plus important à l’avenir », se réjouit le président fondateur Christian Babin.

De plus, forte d‘innovations qui augmentent le cycle de vie de pièces critiques dans la conception des éoliennes, l’entreprise est maintenant en mesure d’élargir son offre à des clients externes œuvrant dans d’autres secteurs d’activités. Non seulement cette diversification maximisera l’utilisation de sa presse industrielle et de son four de frittage, mais la durabilité des pièces produites contribuera également à une réduction de l’empreinte écologique dans l’industrie.

« Avec la participation du programme PARI-CNRC Bas St-Laurent – Gaspésie, nous sommes parvenus à concevoir un matériau de friction dont les formulations innovantes à partir de la métallurgie des poudres permettent d’atteindre des niveaux de performance et de résistance à l’usure qui sont impossibles à atteindre avec des alliages ou des plaquettes organiques traditionnels », poursuit le dirigeant de l’entreprise, ancien professeur en Techniques de maintenance industrielle au Cégep de la Gaspésie et des Îles.

Christian Babin

©Jean-Philippe Thibault - Gaspésie Nouvelles

Christian Babin.

Quart de travail sans travailleur

 

Il y a quelques mois – après un travail de peaufinage et de précision qui aura duré une année au complet – Kuma Brakes a été en mesure de déployer un quart de travail supplémentaire ... sans ajouter un travailleur de plus. Tout a été automatisé.

De 8 h à 17 h, c’est le quart de travail régulier avec les opérateurs et les différents corps de métier qui s’affairent à la tâche, alors que de 17 h à 1 h du matin, l’entreprise peut produire dans la noirceur. « On peut doubler la quantité de production le soir sans personne dans l’usine. C’était un beau défi qu’on vient de relever et c’était vraiment intéressant à faire [...] Avec la pénurie de main-d’œuvre il faut automatiser et trouver d’autres façons de faire. On va être encore plus compétitifs sur les marchés mondiaux », nous expliquait Christian Babin en janvier dernier.

Kuma Brakes compte une dizaine d’employés et pourra incidemment être encore plus compétitif à l’international. En début d’année, les exportations représentaient 92% du chiffre d’affaires de l’entreprise qui a pignon sur rue dans le parc industriel de Sandy Beach.

En contrepartie, plusieurs matières premières de base doivent être importées puisqu’elles sont tout simplement inexistantes au Canada. C’est le cas notamment de la poudre de cuivre; aucune usine n’existe au pays. Les autres poudres métallurgiques utilisées pour les plaquettes de frein ne sont pas davantage fabriquées au Québec, alors que les produits de brasage doivent provenir des États-Unis. « Oui il faut s’approvisionner à l’extérieur, mais comme on exporte à l’international, ça amène de l’argent neuf. L’innovation fait partie intégrante de nos gènes. Si t’avances pas, tout le monde te dépasse », conclut Christian Babin.

EN RAPPEL - TEXTE DU 5 MAI 2021 QUI N'AVAIT PAS ÉTÉ PUBLIÉ SUR LE WEB À L'ÉPOQUE

 

De l’éolien jusqu’aux trains pour Christian Babin

Nul n’est prophète en son pays. Le travail de Christian Babin est probablement davantage reconnu à l’extérieur du pays que dans sa propre ville à Gaspé. Son entreprise Kuma Brakes – la marque de commerce utilisée par Plaquettes de frein haute performance B & B pour faciliter les échanges internationaux – fournit, comme on s’en doute en le lisant, des plaquettes de frein. Pour l’éolien.

Ce qu’on se doute un peu moins en revanche, c’est que dans ses locaux de l’ancienne usine GDS, dans le parc industriel de Sandy Beach, elle en produit environ 40 000 par année. Près de 50% des plaquettes de frein des éoliennes en Amérique du Nord sont fabriquées à Gaspé. En fait, ce sont 95% des ventes annuelles qui sont exportées en dehors des frontières du pays. « On est plus connu à l’extérieur du Canada et ailleurs dans le monde qu’en Gaspésie », lance en riant Christian Babin.

Certaines de ses plaquettes se retrouvent même jusqu’en Chine. Une dizaine d’éoliennes en sont munies présentement. Peut-être même qu’un jour viendra où leur utilisation en Asie sera davantage la norme que l’exception. « On pourrait un jour penser à compétitionner les Chinois sur leur propre territoire », se plaît-il à imaginer.

Longue ascension

 

Sauf qu’avant d’en arriver à ce point, la route a été longue et parsemée de défis. D’autant plus que le fondateur est parti de zéro; ou plutôt d’une feuille blanche et d’une bonne idée. « Très humblement, au début je ne savais même pas en quels matériaux c’était fait une plaquette de frein », avoue celui qui possède un baccalauréat en maintenance industrielle et un autre en mécanique. Qu’à cela ne tienne. L’entrepreneur s’est mis à fouiller, étudier, échanger, dessiner, corriger et surtout, persévérer. Et a su s’entouré des bonnes personnes.

Le produit a donc été développé de 2010 à 2015 et l’usine construite de 2015 à 2017. Comptez un autre 18 mois pour obtenir le sceau d’approbation de General Electric, le plus grand fabricant d’éoliennes au monde. L’attente aura été profitable puisque cette notoriété ouvre bien des portes. Long processus, certes, mais depuis, c’est un peu la consécration. Si les ventes ont commencé seulement en 2018, à partir de ce point, elles ont toujours augmenté. De 200 à 300% les premières années, et encore de 25% l’an dernier malgré la pandémie. Pour l’instant, Kuma Brakes est la seule entreprise de plaquettes de frein frittées pour l’éolien sur le continent.

« Nous sommes les seuls qualifiés en Amérique du Nord. Il faut dire qu’une plaquette, c’est lourd, donc par avion c’est extrêmement cher. Ça doit voyager par bateau. Avec nous, il n’y pas de traversée transatlantique. On peut livrer rapidement. On reçoit des commandes le lundi qui partent en camion le vendredi vers les États-Unis. On a cet avantage de la proximité, même si on est loin du Texas. »

Et si Christian Babin peut penser rivaliser avec l’Empire du milieu, c’est grâce à un procédé unique entièrement développé par le fondateur et son équipe chevronnée. La recette secrète – pression exercée, température de frittage, temps de frittage – permet à Kuma Brakes de s’imposer un peu partout en Amérique du Nord.

C’est que, sans entrer trop dans les détails, comparativement aux plaquettes de frein dites organiques qui étaient utilisées dans les premiers parcs éoliens, comme à Cap-Chat par exemple, celles de Kuma Brakes sont beaucoup plus résistantes. « Quand tu vas dans les plus grandes éoliennes, le type organique, ça use trop vite avec la chaleur engendrée. Ça fait fondre la résine. Pour faire tenir les poudres ensemble, l’autre méthodologie, c’est un four à haute température. On les cuit. On a comparé avec les procédés initiaux à Cap-Chat et les plaquettes frittées comme on fait, ça use 4,3 fois moins », résume Christian Babin.

Train devant

 

C’est justement cette haute résistance qui laisse également croire que le secteur ferroviaire pourrait s’intéresser aux plaquettes de Kuma Brakes. Ce secteur utilise lui aussi des plaquettes dites organiques sur ses wagons.

Des tests sont actuellement menés à Ottawa pour essayer d’obtenir le même coefficient de friction que dans le monde du rail. Des travaux devraient aussi être effectués avec Rail GD à New Richmond. Et probablement sur la Côte-Nord par la suite.

« Il y aurait un fort potentiel d’innovation dans le ferroviaire. Mais c’est un milieu très fermé et traditionnel. Très règlementé aussi. Il faut y aller étape par étape. Il y a aussi la question des coûts qui est non négligeable », rappelle Christian Babin. À lui seul, le banc d’essai à Ottawa nécessite des investissements de 70 000$.

Heureusement, Plaquettes de frein haute performance B & B a toujours pu compter sur un entourage qui croyait en lui. L’entreprise a notamment reçu des aides financières du Conseil national de recherche du Canada via le Programme d’aide à la recherche industrielle. « On a été choyés par le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie avec notre conseiller Stéphane Héroux qui croit en nous et nous aide. C’est digne de mention et je dois le souligner. Sans ça nous n’en serions pas rendus là. Et tous les autres aussi que je ne voudrais pas oublier. C’est un avantage. Pas certain que j’aurais pu démarrer ça à Montréal. Ça aurait été pas mal plus difficile qu’à Gaspé. » Les organisations locales telles que la MRC, la SADC et le ministère de l’Économie et de l’Innovation ont aussi mis l’épaule à la roue, notamment.

Et depuis décembre, un grand projet d’automatisation est en branle pour augmenter le rendement. Le propriétaire veut également commencer à fabriquer ses propres plaques d’acier prochainement, pour moins dépendre des aléas des fournisseurs. Deux nouveaux postes sont d’ailleurs à combler, ce qui porterait le total à une dizaine d’emplois, incluant les ventes et l’administration.

Si on disait d’entrée de jeu que nul n’est prophète en son pays, il faut avouer que c’est de moins en moins vrai. Plaquettes de frein haute performance B & B a récemment remporté le Volet Réussite à la 23e édition du Défi OSEntreprendre Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine; une bonne tape dans le dos. « Ç’a été un tour de force développer et innover à partir de Gaspé, on s’entend qu’il n’y a pas d’experts en métallurgie des poudres ici. On a fait des pièces à Détroit, des tests en Allemagne, aux installations du Conseil de recherche du Canda à Boucherville. Il faut avoir l’esprit d’entrepreneur. Mais j’ai des vraiment bonnes personnes avec moi dans l’équipe. Ce prix, c’est une reconnaissance de tous les efforts mis depuis 11 ans dans le projet », conclut Christian Babin.

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