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30 juillet 2021

Jean-Philippe Thibault - jpthibault@medialo.ca

Les microdistillateurs dénoncent une pratique jugée malhonnête

GASPÉSIE

Société secrète

©Photo tirée de Facebook

Vente sur place à la boutique de l’artisan ou vente en succursale à la SAQ, la société d’État se garde la même marge de profit.

En pleine saison estivale, la microdistillerie la Société secrète écoule l’intégralité de ses stocks à sa boutique de Cap d’Espoir.

Aucune chance de retrouver une de leur bouteille à la SAQ, ni en ville ni en région. Les touristes font la queue et se renouvellent constamment pour faire un tour dans l’ancienne église anglicane désacralisée devenue lieu de création éthylique. Les visiteurs en apprennent davantage sur la production artisanale, goûtent les subtilités aromatiques des différents produits et souvent repartent avec un échantillon ou deux du précieux nectar. Bon an mal an, la Société secrète peut ainsi vendre sur place au moins 10 000 bouteilles pendant la haute saison. Sauf que vente sur place à Cap d’Espoir ou vente en succursale à Montréal, la SAQ conserve pour elle le même montant : un peu plus de 20$ par bouteille.

Une situation décriée par les microdistillateurs du Québec et ceux de la Gaspésie, qui demandent un ajustement de cette majoration. « Quand on vend une bouteille en boutique, il y a 52% prélevé par la SAQ, à la demande du gouvernement. On a aucun problème avec ça quand ils viennent chercher les produits chez nous, les distribuent dans leur réseau et doivent payer leur personnel et leurs propres frais. C’est normal qu’ils doivent faire un profit, explique Michel Fleury, copropriétaire de la Société secrète. Mais quand c’est nous qui aménageons une boutique à même notre distillerie, produisons les spiritueux, payons des employés pour les vendre sur place et que finalement la SAQ n’a pas touché à la bouteille, c’est complètement injuste voire malhonnête qu’ils fassent les mêmes profits qu’en succursale. En fait, c’est même un profit supérieur pour eux puisqu’ils n’ont plus les dépenses qui viennent avec. On devient de petites succursales, mais sans les avantages. »

Vétuste loi à revoir

 

Les ventes de spiritueux provenant des microdistilleries québécoises ont augmenté de 87% entre 2019 et 2020. L’industrie a le vent dans les voiles et l’agrotourisme est de plus en plus populaire. « Les gens font le tour des microdistilleries et veulent une expérience. On le constate vraiment, analyse Michael Briand, copropriétaire chez O’Dwyer à Gaspé. Sauf que c’est difficile de réinvestir de l’argent pour améliorer l’expérience des visiteurs quand on ne peut pas garder cette partie sur les bouteilles vendues à la boutique. »

Plusieurs craignent même que les prélèvements de la SAQ pour les spiritueux vendus dans la boutique des artisans leur soit ultimement fatal. « Plusieurs de nos membres sont à bout de souffle. La réglementation en place freine carrément leur développement et compromet leur avenir. Nous demandons au gouvernement d’agir pour que nous puissions toucher les revenus qui nous reviennent. Au-delà de ses belles paroles, le gouvernement doit passer à l’acte! », plaide Jonathan Roy, président de l’Union québécoise des microdistilleries.

Si les ventes à la propriété ne représentent que des revenus négligeables pour le gouvernement, les sommes en jeu seraient la bienvenue pour un réinvestissement local. Faites le calcul en abolissant cette majoration de 20$ pour les 10 000 bouteilles vendues l’été à la Société secrète et vous obtenez une coquette somme à réinvestir dans l’entreprise.

D’autant plus que chez les producteurs d’alcool, les microdistillateurs sont les seuls pour lesquels il est prélevé une majoration sur la vente à la propriété, contrairement aux microbrasseurs et aux vignobles, par exemple. Le Québec est aussi la seule province canadienne où les revenus des producteurs, pour leurs ventes sur place, sont en dessous de la barre des 50 %. « Pourquoi nous on est pris avec cette mesure? On demande juste l’équité avec les autres producteurs d’alcool. Le profit de la SAQ n’a pas lieu d’être collecté dans nos boutiques. Ça prend une mise à jour dans la loi », estime Michel Fleury.

Ce dernier rappelle au passage que la loi leur permet aussi par exemple de faire déguster leurs spiritueux sur place, mais pas de faire payer les gens pour leur échantillon « C’est une autre absurdité de la loi, qui est complètement vétuste. On doit donner notre alcool. C’est quand même spécial. Ça fait longtemps qu’on se fait dire des belles paroles, mais rien ne bouge. Quand c’est le temps de sortir une loi spéciale ou mettre en application un décret, ça se fait en deux temps trois mouvements, mais notre dossier traîne depuis des années. Quand on dit que ça étouffe l’industrie, ce n’est pas des blagues. Je pense qu’on va voir des fermetures de distillerie. Ce qui est en plein essor va finir par s’essouffler et suffoquer. Et ce n’est pas parce que les ventes ne sont pas au rendez-vous. »

La Société secrète compte 7 employés et a une capacité de production annuelle d’environ 25 000 bouteilles. O’Dwyer compte le même nombre de personnel et sa production annuelle avoisine les 100 000 bouteilles. « Le problème ce n’est pas la SAQ, ce sont les lois. Mais on sent quand même une certaine ouverture du gouvernement », conclut Michael Briand sur une note plus positive.

Répartition des sommes pour une bouteille de gin de 45,50$

TPS : 1,98 $
TVQ : 3,95 $
Taxe spéciale sur l’alcool : 1,05 $
Taxe d’accise fédérale : 4,30 $
Majoration SAQ : 20,07 $
Producteur : 14,15 $

*Source UQM

O'Dwyer

©Jean-Philippe Thibault - Gaspésie Nouvelles

Commentaires

1 août 2021

André de Québec

Même si je ne suis pas un amateur de spiritueux, un fait demeure. Après une lecture attentive il m’a été facile de comprendre la situation et de souscrire entièrement et sans restriction aucune à la nécessité de vous traiter d’égal à égal, le tout avant les… calendes grecques .

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